Impact de la crise du Covid-19 sur l’économie

Premières évaluations pour les intercommunalités


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Contexte et Méthode

L’Insee, l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) ou la Banque de France ont proposé dernièrement des estimations de l’impact de la crise du Covid-19 et du confinement sur l’activité économique française. Cette activité, mesurée à travers le produit intérieur brut (PIB)*, est sans surprise fortement ralentie depuis la mise en œuvre des mesures de confinement. Au total, ces dernières dureront 8 semaines complètes.

La baisse de l’activité concerne tous les secteurs d’activité mais pas dans les mêmes proportions. Le secteur de la construction ou encore les services d’hébergement et de restauration voient leur activité fortement ralentie, quand le secteur agricole ou celui de l’industrie agro-alimentaire enregistrent des pertes de moins grande ampleur.

Les travaux publiés sur l’impact du confinement sur l’économie par les institutions nationales ne proposent pas de déclinaisons locales. Il est toutefois possible de remobiliser leurs résultats pour estimer la perte d’activité économique à l’échelle des intercommunalités.

La perte d’activité économique sera d’autant plus forte qu’un territoire dispose d’un tissu économique spécialisé dans des secteurs subissant de fortes baisses d’activité. L’exercice d’estimation qui suit met ainsi en avant des effets de positionnement sectoriel, ou effets de structure, et ne traite pas des effets d’éventuels « facteurs locaux » comme par exemple les comportements des entreprises et des acteurs publics locaux en réaction à la crise. Les estimations s’appuient sur les pertes de valeur ajoutée simulées par l’OFCE dans le Policy brief n°66, 20 avril 2020 (voir « Données, méthode et limites » pour plus de précisions).

* Le produit intérieur brut est la richesse créée par un État. Il correspond à la somme des valeurs ajoutées créées par les entreprises. La valeur ajoutée représente la richesse nouvelle produite par l’entreprise lors du processus de production. Elle permet de calculer la richesse brute créée par une entreprise, avant rémunération de ses salariés, de ses apporteurs de capitaux et des administrations.

Estimation de l’impact du confinement sur l’activité économique des intercommunalités

Pendant toute la période de confinement (du 17 mars au 10 mai 2020), la région Centre-Val de Loire enregistre une baisse d’activité estimée de 29%, le département d’Indre-et-Loire, de 30%, soit un peu moins que la valeur moyenne estimée en France (-32%). La carte ci-dessous présente le positionnement de chaque EPCI par rapport à la France dans un cadran positionné sur l’Ouest du pays et l’axe ligérien.

Données : Insee, RP 2016 exploitation complémentaire au lieu de travail.
Sources : IGN ; Insee, mars 2020 ; Ofce, avril 2020. Traitements ATU. 
N.B. Seules quelques villes centres des intercommunalités sont mentionnées.

Estimation de l’impact sur l’activité en Indre et Loire

Les économies locales sont toutes fortement et durement touchées par ces 8 semaines de confinement. Dans les intercommunalités françaises, la valeur la plus faible de perte d’activité est de 16%, la plus forte de 45%. Les résultats pour l’Indre-et-Loire révèlent une diversité de situation avec un écart de 7 points entre les valeurs extrêmes, c’est-à-dire entre les pertes d’activité estimées de Chinon, Vienne et Loire (28%) et Touraine Vallée de l’Indre ou Touraine Est-Vallées (35% respectivement).

Impact du confinement dans les intercommunalités d’Indre-et-Loire

Données : Insee, RP 2016 exploitation complémentaire au lieu de travail. Sources : Insee, mars 2020 ; Ofce, avril 2020. Traitements ATU. 

Explication de l’impact différencié

Les écarts observés s’expliquent par des effets de spécialisations économiques. Dans le détail, les deux secteurs subissant les plus fortes baisses d’activité sont la construction et l’hébergement et restauration. Réciproquement, les deux secteurs enregistrant les baisses les plus faibles sont les activités immobilières et l’administration publique, l’enseignement, la santé et l’action sociale ou autrement dit les services non marchands. Le tableau ci-dessous précise leurs poids minimal et maximal dans la valeur ajoutée dans les intercommunalités d’Indre-et-Loire.

Poids minimal et maximal des deux secteurs les plus et moins touchés par la baisse d’activité pendant le confinement dans les intercommunalités d’Indre-et-Loire

Données : Insee, RP 2016 exploitation complémentaire au lieu de travail. Sources : Insee, mars 2020 ; Ofce, avril 2020. Traitements ATU. 

Les communautés de communes Touraine-Est-Vallées et Touraine Vallée de l’Indre sont les plus impactées par la période de confinement. Le secteur de la construction y contribue à hauteur de plus de 10 points de valeur ajoutée pour la première et de 9 points pour la seconde. Ensuite, Touraine Est-Vallée est fragilisée par le poids de son industrie dans la valeur ajoutée tandis que Touraine Vallée de l’Indre l’est par celui des services marchands (transport et entreposage, activités scientifiques et techniques, services administratifs et de soutien).

Dans toutes les autres intercommunalités, le secteur de la construction explique en premier lieu la baisse d’activité hormis dans celles du Val d’Amboise, du Castelrenaudais et au sein de Tours Métropole Val de Loire.Dans le Castelrenaudais, les services marchands, en particulier les activités scientifiques et techniques, services administratifs et de soutien, et la fabrication de produits industriels, contribuent à hauteur de 15 points de valeur ajoutée à la baisse d’activité.

Au sein du Val d’Amboise, l’importance du tourisme se retrouve au travers d’une contribution de plus de 3 points de valeur ajoutée du secteur hébergement et restauration à la perte d’activité totale. L’empreinte industrielle du territoire est également présente à travers la perte de plus de 8 points de valeur ajoutée dans la fabrication d’autres produits industriels.

Au sein de la métropole de Tours, ce sont les services marchands qui expliquent pour plus de 20 points la baisse de l’activité économique, en particulier les activités scientifiques et techniques, services administratifs et de soutien et le commerce ; réparation d’automobiles et de motocycles. A contrario, sa spécialisation dans les services non marchands (24% de la valeur ajoutée locale) joue comme un amortisseur de crise. Plus généralement, les territoires les plus spécialisés dans cette activité sont un peu plus avantagés. C’est le cas également du Casterenaudais et de Gâtine et Choisilles – Pays de Racan où les services non marchands pèsent respectivement 23% chacun dans la valeur ajoutée locale ; dans les autres intercommunalités, ils pèsent entre 18% et 22%, et en Indre-et-Loire, 23%.

Enfin, la baisse la plus faible observée dans le département, celle de Chinon, Vienne et Loire, s’explique par le poids important dans la valeur ajoutée locale du secteur industries extractives, énergie, eau, gestion des déchets et dépollution (24%). Ce dernier connait une des plus faibles pertes d’activité de la branche industrielle (20%).

 

Conclusion

La période de confinement liée à la crise du Covid-19 aura mis un coup d’arrêt à la reprise de la croissance française. Les résultats présentés révèlent surtout la violence du choc pour l’ensemble des tissus économiques locaux. Ils ne disent rien de ce qui arrivera. Les économies locales qui paraissent les plus vulnérables ne sont pas condamnées. Les effets de cette crise sont encore devant nous. La reprise de l’activité sera plus ou moins aisée selon les secteurs d’activité, les spécialités des entreprises locales, les comportements des acteurs locaux, les innovations révélées pendant cette période, les garanties apportées par les institutions, etc. le tout dans un monde caractérisé par de multiples interdépendances.

Données, méthode et limites  

Les estimations de perte de valeur ajoutée par secteur portent sur une partition de l’économie en 17 secteurs d’activité économique. Les données traitées sont celles de l’emploi au lieu de travail du recensement général de population 2016 (Insee, exploitation complémentaire au lieu de travail). Elles ont été utilisées pour calculer le poids de chacun des secteurs dans l’emploi total des territoires observés.

Ensuite, le poids des secteurs dans la valeur ajoutée locale a été obtenu en partant du poids dans l’emploi des secteurs auquel ont été respectivement appliqué un coefficient correspondant au ratio entre la part de chacun des secteurs dans l’emploi et dans la valeur ajoutée française. Ce ratio a été calculé sur la base des données fournies par l’Insee dans son point de conjoncture du 26 mars 2020. Une fois le poids de chaque secteur dans la valeur ajoutée locale estimée, ont été appliquées les simulations réalisées par l’Ofce sur la perte de valeur ajoutée de chacun des secteurs à l’échelle nationale.

Tableau synthétique des coefficients appliqués pour estimer les pertes de valeur ajoutée locale

Sources : Insee, mars 2020 ; Ofce, avril 2020.

Enfin, comme dans tout exercice de mesure d’impact, ces résultats sont à prendre avec précaution. D’abord, la décomposition en 17 secteurs d’activité économique masque des effets plus fins de spécialisation économique locale qui pourraient in fineimpacter positivement ou négativement les pertes estimées. Ensuite, des « facteurs locaux » comme les comportements des acteurs locaux, les stratégies qu’ils ont déployées, etc. ne sont pas pris en compte. Enfin, l’ensemble des institutions ayant fait part de leurs prévisions relèvent le caractère exceptionnel de cette crise nécessitant d’adapter les méthodes de prévision habituelles. De par leur originalité, elles comportent une marge d’erreur. Néanmoins, la majorité des estimations réalisées sur la perte d’activité économique française vont dans le même sens (une trentaine de % de perte de valeur ajoutée).

Sources

Agence d’urbanisme de la région de Saint-Nazaire (addrn), 2020, « Covid : impact économique majeur », Baromètre Edition spéciale, n°4, avril.
https://addrn.fr/wp-content/uploads/2020/04/barometre04_criseVF.pdf

Bouba-Olga Olivier, 2020, « Covid 19, épisode 12 : l’impact économique de l’épidémie »
http://blogs.univ-poitiers.fr/o-bouba-olga/2020/04/08/covid-19-episode-12-limpact-economique-de-lepidemie/

Insee, point de conjoncture du 26 mars 2020.
https://www.insee.fr/fr/statistiques/4473294?sommaire=4473296

Ofce, 2020, « Évaluation au 20 avril 2020 de l’impact économique de la pandémie de COVID-19 et des mesures de confinement en France : Comptes d’agents et de branches », Département analyse et prévision de l’OFCE, Policy brief, n°66, 20 avril.
https://www.ofce.sciences-po.fr/pdf/pbrief/2020/OFCEpbrief66.pdf

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